L’intéressant petit Bulletin d’information adventiste (N° 345, février 2011) attire mon attention sur une nouvelle qui m’avait échappé le mois dernier: lors d’une session conjointe de leurs synodes extraordinaires à Paris les 15 et 16 janvier 2011, l’Eglise évangélique luthérienne de France et l’Eglise réformée de France ont fait un pas en avant dans le processus qui, en principe, doit aboutir en 2013 à l’union des deux Eglises: le fruit de cette union portera le nom d’Eglise protestante unie de France. En sous-titre sera ajoutée l’indication: Communion luthérienne et réformée. (En Alsace-Moselle, les Eglises réformée et luthérienne se sont unies en 2006 pour former l’Union des Eglises protestantes d’Alsace et de Lorraine.)
Le phénomène des “Eglises unies” a déjà une longue histoire dans le protestantisme: les Eglises unies en Allemagne en sont un exemple, mais il y en a d’autres ailleurs. Ces initiatives ont notamment découlé d’une relativisation de l’importance des différences dogmatiques entre les deux grandes branches du protestantisme. En 1973, nombre d’Eglises luthériennes et réformées ont adopté la Concorde de Leuenberg, par laquelle elles se reconnaissaient en pleine communion. La formation de l’Eglise protestante unie de France en est une suite logique et apparaît comme “une évidence” pour beaucoup de protestants français, même s’il ne faut pas ignorer la persistance de certaines différences (La Croix, 24 janvier 2011). “La tendance globale est à l’unité”, affirme Henrik Lindell (Témoignage chrétien, 21 janvier 2011).
En marge de ce développement dans l’histoire du protestantisme français, une observation plus générale sur des conséquences involontaires de processus d’union: ceux-ci entraînent parfois l’éloignement de certaines composantes des groupes s’unissant, qui ne peuvent se reconnaître dans la nouvelle entité. Ce phénomène avait été souligné dans un article de l’Economist (18 octobre 2008), au moment de l’unification entre le Patriarcat de Moscou et l’Eglise orthodoxe russe hors-frontières (une branche émigrée de l’Eglise russe, qui menait une existence indépendante depuis la Révolution de 1917); un certain nombre de paroisses russes en exil n’acceptèrent pas la réunion et séparèrent pour former de nouvelles entités religieuses ou se rallier à d’autres groupes existants. Paradoxalement, efforts vers l’unité et nouvelles fragmentations peuvent aller de pair.