Un matin de juin, à Istanbul, sur l’avenue Istiklal, toujours aussi fréquentée. Devant une vitrine, un homme barbu, élégamment habillé, chante, en lisant les paroles sur son téléphone mobile, accompagné par un violoniste un peu hésitant. Il n’a pas l’allure habituelle d’un chanteur de rue. Cela m’intrigue, je ralentis. Je remarque quelques personnes qui se tiennent à quelques pas et regardent. Il y a aussi un caméra. Je repère ensuite, embusqués à l’entrée d’une rue adjacente, deux musiciens qui attendent. Je regarde autour de moi: deux autres musiciens postés également de l’autre côté de la rue, discrètement, leur instrument à la main.
La vogue des flash mobs aurait-elle donc gagné Istanbul? Je m’arrête pour regarder ce qui va se passer. Comme prévu. deux musiciens viennent rejoindre le chanteur. Puis deux autres. Et deux autres encore. C’est maintenant un petit ensemble qui joue avec enthousiasme, tandis que les passants s’arrêtent et que la caméra filme.
Arrive alors le porteur d’un bouquet de fleurs: celui-ci est remis au chanteur. Il s’approche d’une jeune femme, lui offre le bouquet. Je comprends tout: non, ce n’est pas une flash mob, mais une déclaration publique. La jeune femme accepte le bouquet, écrase une larme émue. Mais les musiciens attendent mieux: “Alors, Madame?...“ Elle crie enfin le mot que tout le monde attend: ”Evet! (Oui!)” Le soupirant embrasse sa bien-aimée, et les familles se congratulent.