Une pasteure protestante me disait avoir longtemps comparé l’Église catholique et l’Église réformée en reconnaissant que la première avait le sens de la liturgie, tandis que les réformés gardaient pour atout la qualité de leur prédication. Mais, ajoutait-elle avec une pointe d’humour, “depuis que j’ai l’occasion d’assister à des messes dans un couvent dominicain et que j’y entends de solides prédications, je n’en suis plus si sûre…”
Une initiative annoncée le 1er novembre 2013 par la Fédération des Églises protestantes de Suisse (FEPS) montre cependant que l’association entre message évangélique réformé et prédication est toujours bien vivante: la FEPS lance un “Prix suisse de la prédication“ (doté d’une somme de 3.000 francs suisses), qui sera décerné pour la première fois le 2 novembre 2014, à l’occasion du "dimanche de la Réformation”.
“L’Église est là où a lieu l’Évangile, où il est communiqué à la paroisse et où il est vécu et témoigné par celle-ci. Dans la tradition réformée, la prédication constitue la clef de voûte du culte”, rappelle le site de la FEPS. Et l’enjeu est la “culture de la prédication”, élément du “patrimoine culturel occidental”.
“La Fédération des Églises entend renforcer la prédication en tant que préoccupation majeure de la Réforme et art précieux de la parole. Le Prix suisse de la prédication doit promouvoir l’intérêt du public pour l’art de la prédication et honorer les transpositions les plus réussies de l’Évangile à notre époque contemporaine.”
Autour du thème “Appelés à la liberté”, la prédication doit porter sur un texte biblique et avoir été prononcée dans un cadre paroissial. Les candidats doivent soumettre le texte de la prédication sous forme écrite et l’accompagner d’une description du culte et de la paroisse dans lesquels la prédication a été faite. Toute personne chargée de prêcher dans une paroisse protestante peut y participer. Les prédications “seront évaluées en fonction de la dimension théologique donnée à un texte biblique, et de sa transposition dans l’ici et le maintenant”.
Aurait-il fallu évaluer ces prédications sur la base d’une vidéo? Non, estime Cristina Tuor, directrice de l’Institut de théologie et d’éthique (même si des membres du jury iront visiter des cultes tenus par les auteurs des dix meilleures prédications retenues pour peaufiner leur évaluation): “une prédication mauvaise restera mauvaise même si elle est bien présentée, comme l’a relevé avec pertinence un professeur de théologie pratique. La dramaturgie doit déjà être contenue en germe et être visible dans le texte.”