Mon barbier vient d’Italie. Homme de longue expérience dans son art, il sait tailler une barbe comme on le fait encore dans les pays du Sud. Ce rituel chez le barbier, avec mousse et blaireau, est chaque fois un moment de plaisir et de détente, avec le sentiment de sortir le visage tout frais.
Comme tout barbier italien, il ne manque pas de s’intéresser aux exploits de son équipe de football; il ne regarde cependant que les compétitions entre équipes nationales, a-t-il précisé. Sans le montrer, il doit être consterné par les maigres connaissances d’un client tel que moi: j’ignorais même qui avait joué la veille et quelles équipes avaient gagné. J’ai appris, grâce à lui, que l’équipe croate était réputée pour son talent technique: les Brésiliens de l’Europe, paraît-il. Cela expliquerait qu’ils aient gagné face aux Espagnols: je n’en savais rien (même pas qu’ils avaient gagné), et je suis donc sorti un peu moins ignorant de la boutique du barbier.
Je me suis alors inquiété du dilemme du barbier quand un match se déroule durant les heures d’ouverture de son salon. Pas d’inquiétude pour le prochain match où jouent les Italiens, m’a-t-il rassuré: ce sera lundi, jour de congé pour lui
Mais ce n’est pas toujours le cas: un récent match se jouait à une heure où il reçoit d’habitude ses clients. Heureusement, il a trouvé la solution: «J’ai placé sur la porte une affichette indiquant: Prière de ne pas déranger sauf urgence (mariage, divorce, funérailles).»