J’aime les douaniers français et leurs réparties plaisantes. Cela remonte sans doute à mon premier voyage en France. J’avais 16 ans, je voyageais seul, et mon père avait pensé qu’il suffisait de me donner une autorisation de sortie sous la forme de quelques lignes signées sur une carte de correspondance, sans authentification. J’arrivai à la gare de Genève, côté suisse, pour prendre un train de nuit depuis les quais de gare de l’autre côté des contrôlera douaniers. Le douanier suisse jeta sur l’autorisation paternelle un regard sceptique: “Je veux bien vous laisser passer, mais mes collègues français n’accepteront jamais une pièce telle que celle-ci.” Je m’imaginais déjà refoulé à la frontière pour le premier de mes voyages indépendants hors de Suisse. J’arrivai donc devant le douanier français, l’oreille basse, en lui expliquant d’emblée mon problème. La réponse fusa, superbe: “Aucun problème, Monsieur: vous êtes en France!”
Après cette expérience initiale, comment ne pas éprouver un sentiment reconnaissant et bienveillant pour les accueillants douaniers français? Et encore plus depuis que ceux-ci m’ont valu deux moments d’anthologie, lors d’un déplacement à Metz à la fin du mois de janvier, en traversant la frontière à la gare de Bâle.
Cela commença par un contrôle douanier à la gare, en accédant au secteur français: “Vous transportez des capitaux?” – “Non, Monsieur. D’ailleurs, je suis Suisse, et je ne pense pas qu’il y ait beaucoup de Suisses qui transfèrent leurs capitaux en France…” Le douanier goûta modérément ma pointe un peu cruelle et répliqua sans se démonter: “Ça viendra un jour…” Nous voilà prévenus!
Une quinzaine de minutes plus tard, assis dans le train qui démarrait, de nouveau des douaniers – c’était le jour! Je les accueillis en souriant et leur expliquai avoir déjà été contrôlé à la gare. “Ah bon? Vous voyez, la France est bien gardée!” Mais, tandis qu’ils quittaient le wagon, j’entendis de loin son collègue incrédule lancer au douanier: “Tu lui as dit que la France était bien gardée? Comment peux-tu dire de pareilles bêtises?”