Ce soir, à Lausanne, en présence du réalisateur, j’ai eu le plaisir d’assister à une première du nouveau film de Stefan Haupt: Sagrada Familia – el misteri de la creació. Déjà projeté en Suisse alémanique, et dès fin décembre en Allemagne, ce film sortira sur les écrans de la Suisse romande le 5 décembre; espérons qu’il trouvera bientôt aussi un distributeur en France.
Un film sensible, solidement construit, d’une grande cohérence: sans imposer au spectateur une thèse, mais en stimulant sa réflexion, il permet de pénétrer au cœur de cette extraordinaire entreprise d’architecture, de foi – et de conscience catalane – que représente cette église. Sa construction a débuté à Barcelone en 1882 et le chantier a été repris dès l’année suivante par Antoni Gaudí (1852-1926); l’édification continue aujourd’hui, à l’image de ces cathédrales médiévales dont l’achèvement pouvait demander deux ou trois siècles. Peut-être l’étonnant édifice sera-t-il achevé à temps pour le centenaire de la mort de Gaudi, car cela est techniquement possible aujourd’hui, comme l’explique l’un des interlocuteurs de Stefan Haupt, mais peu importe finalement: c’est l’acte de construire en lui-même qui compte et fait de ceux qui y travaillent des passionnés.
Le film nous introduit dans une réflexion sur la relation entre sacré et modernité, sur l’insertion d’une telle monumentale expression de foi dans un environnement sécularisé. Comme le reconnaît le contremaître qui est l’un des personnages interrogés du film, on ne s’engagerait sans doute plus aujourd’hui dans une telle aventure, mais il faut achever ce que Gaudí avait commencé.
Non sans débats: depuis des années s’opposent ceux qui pensent qu’il était juste de poursuivre dans la ligne de Gaudí et ceux qui auraient préféré des apports plus “adaptés à l’époque actuelle” – jusqu’à proposer une mue de la cathédrale en espace multiconfessionnel et social. De fait, sans même parler des techniques utilisées, plusieurs apports innovent, dans le cadre posé par Gaudí. Ainsi en va-t-il de la (controversée) façade de la Passion ou d’admirables vitraux abstraits, dont la symphonie de couleurs permet de “créer une atmosphère”, comme le résume leur auteur et comme le montrent de superbes images.
“La Sagrada” est la démonstration que l’esprit des constructeurs de cathédrale n’est pas mort, à l’image du contremaître précité, fier de participer comme anonyme à une telle œuvre, ou du sculpteur japonais Etsuro Sooto, converti au catholicisme pour regarder dans la même direction que Gaudí et s’immerger totalement dans le travail à accomplir, quand il évoque le dialogue du sculpteur avec la pierre.
Pour toute information complémentaire, vous pouvez visiter le site du film et y voir la bande de lancement ainsi que les annonces des projections: http://www.sagrada-film.ch/accueil.html.