Parmi les innombrables groupes religieux nés au cours des derniers siècles, beaucoup n’ont fait l’objet d’aucune étude historique. Heureusement, il y a parfois un membre d’un de ces groupes qui s’engage dans un patient labeur pour en conserver l’histoire. Le résultat prend souvent la forme d’une chronique. Mais cela n’ôte rien à la valeur de ces travaux, surtout quand les auteurs s’efforcent à l’équilibre et n’écrivent pas une histoire “aseptisée”, mais font aussi état des tensions et problèmes qui ont traversé le cheminement de leur mouvement.
Tel est le cas de Robert Coulter (né en 1930), dont j’ai apprécié le volume de plus de 500 pages racontant l’histoire de la Church of God (Seventh Day), agrémenté d’illustrations qui complètent bien le récit. Coulter a été durant des années l’un des dirigeants de cette Église. En fait, à la suite de schismes survenus au cours du XXème siècle, plusieurs Églises portent le même nom: ce groupe, dont le siège se trouve dans la région de Denver (Colorado), est le plus important numériquement et rassemble aujourd’hui près de 300.000 membres dans une quarantaine de pays.
Cette Église doit son origine en 1858 à Gilbert Cranmer (1814-1903), un prédicateur américain d’origine méthodiste, qui avait rejoint la Christian Church (Connexion), puis, en 1843-1844, fut convaincu par la prédication adventiste de William Miller (1782-1849). Après la “grande déception” de la non réalisation du Second Avènement du Christ en octobre 1844, Cranmer se retira d’abord du ministère, avant d’embrasser la croyance que l’observance du Sabbat (septième jour, c’est-à-dire le samedi) restait un devoir pour les chrétiens. Il en fut convaincu par Joseph Bates (1792-1872): ce même Bates convainquit également Ellen White (1827-1915) et son époux d’embrasser la doctrine du sabbat, pour organiser ensuite avec eux l’Église adventiste du septième jour, aujourd’hui forte de plus de 18 millions de membres. Cranmer rencontra les époux White en 1857 et 1858, mais ne put obtenir d’eux une reconnaissance de ministre du culte, notamment parce qu’ils réprouvaient son usage du tabac. Il entama un ministère indépendant, entretenant des relations avec des groupes adventistes qui n’acceptaient pas l’autorité des White; certains adventistes du septième jour rejoignirent par la suite le groupe de Cranmer, qui subit aussi certaines influences d’un autre groupe héritier du millérisme, l’Advent Christian Church.
Tant l’Église adventiste du septième jour que l’Église de Dieu du septième jour sont donc issues de la prédication millérite et sont fidèles au sabbat, même si elles ont suivi des chemins séparés. Impossible de résumer ici les épisodes et péripéties de la vie de l’Église de Dieu du septième jour, narrées par Coulter. Elle connut des évolutions doctrinales, notamment en matière de christologie. Elle compta aussi durant quelques années parmi ses ministres du culte Herbert W. Armstrong (1892-1986), qui fonda par la suite l’Église universelle de Dieu (laquelle donna naissance par la suite à une variété de groupes). Comme le remarque Coulter, les fondateurs du mouvement n’auraient jamais pensé qu’il existerait encore plus de cent-cinquante ans après: ils espéraient l’imminent retour du Christ. Si ce siècle et demi d’histoire intéresse avant tout les membres de l’Église de Dieu du septième jour, il retient aussi l’attention d’historiens des mouvements religieux.
Robert Coulter, The Journey. A History of the Church of God (Seventh Day), 2014, 528 p. – Le livre n’est pas vendu en librairie et doit être commandé directement auprès de la boutique en ligne de la Church of God (Seventh Day).